Non classé

Le classement au titre des Monuments historiques, étape essentielle en matière de conservation du patrimoine : le cas emblématique des châteaux du Val de Loire

 

Cliquer sur les vues stéréoscopiques afin de les afficher sur la Stéréothèque avec leur notice et parfois leur anaglyphe (rouge et bleu)

Le château de Chambord, façade méridionale, 1875-1900, photographe inconnu, collection Société Archéologique de Bordeaux, SAB295

Comme chaque mois de septembre, occasion de mettre en lumière la conservation du patrimoine, nous faisons une pose dans nos itinérances pyrénéennes ou bretonnes.

La France fut, en Europe, un des premiers pays à se préoccuper de la conservation de son patrimoine architectural, démarche qui a abouti aux procédures d’inscription et de classement au titre des Monuments historiques, démarches dont plus personne, aujourd’hui, ne conteste le bien-fondé et l’intérêt pour assurer la meilleure protection de notre patrimoine.

La notion de Monument historique est apparue au cours de la Révolution française, dans le prolongement des idées du Romantisme. Cette émergence a débouché sur une politique de protection mise en place dès la Monarchie de Juillet, sous forme d’une reconnaissance d’intérêt public pour les immeubles (édifices, jardins et parcs, réserves archéologiques, etc.) plus particulièrement centrée sur l’art et l’histoire architecturale, en y affectant une servitude d’utilité publique.

Il existe aujourd’hui deux niveaux de protection : l’inscription au titre des monuments historiques (autrefois « inscription à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques »), pour les meubles et immeubles présentant un intérêt à l’échelle régionale, et le classement au titre des monuments historiques, considérés comme d’intérêt national. Couramment, on dit d’un bien, dans le premier cas, qu’il est « inscrit », et dans le second qu’il est « classé ».

L’un des plus anciens témoignages de restauration d’un monument historique dans nos collections n’est pas un château de la Loire, mais la Sainte-Chapelle en travaux, février à juillet 1853, photographe inconnu, collection Dupin, DUP0252

Le terme de « monument historique » est employé pour la première fois en 1790 à l’occasion d’un rapport d’Aubin Louis Millin auprès de l’Assemblée constituante (la saisie des biens de la Monarchie, de l’Église et des émigrés entraînant très rapidement la nécessité d’éviter le vandalisme).

Sous l’impulsion de Talleyrand, on adopte le 13 octobre 1790 un décret établissant une commission des monuments pour étudier « le sort des monuments, des arts et des sciences ».

Alors que les premières Sociétés archéologiques viennent de se constituer, en 1819, pour la première fois, le budget du ministère de l’Intérieur comporte une ligne « monuments historiques », à laquelle est allouée une somme de 80 000 francs.

Vue 01 – Portrait de Prosper Mérimée par Charles Reutlinger (Wikipedia)

Puis, sous la Monarchie de Juillet, le 21 octobre 1830, le ministre de l’Intérieur (François Guizot), dans un rapport présenté au roi Louis-Philippe, propose de créer un poste d’inspecteur des Monuments historiques, d’abord attribué à Ludovic Vitet en 1830, puis, en mai 1834 à Prosper Mérimée, le célèbre historien et écrivain. Dans la foulée est créée une Commission permanente des Monuments historiques.

La politique ainsi définie débouche, en 1840, sur la publication d’une première liste de 1 082 monuments historiques (d’ailleurs dite « liste Prosper Mérimée ») dont 934 édifices, liste composée uniquement de monuments préhistoriques, antiques ou « médiévaux » (allant alors jusqu’au XVIe siècle). La plupart sont des propriétés de l’État, du département ou de la commune, dont la conservation nécessite des travaux (et donc des crédits). Le classement est de ce fait, dès le départ, un point d’appui pour l’octroi de subventions en matière de restauration.

Ce n’est que dans les années 1920-1930 que le classement s’ouvre au patrimoine privé, car, dans un premier temps, ce classement est considéré comme une servitude et une privation de propriété ; c’est pourquoi, la démarche est compensée par un subventionnement des travaux, puis par des avantages fiscaux. À ce moment, il s’ouvre aussi à la Renaissance et à l’âge classique, du XVIe au XVIIIe siècle.

Inscription et classement : l’exemple des châteaux du Val de Loire :

Quoi de plus emblématique, en France, que les « châteaux de la Loire », lorsqu’on pense aux Monuments historiques. L’ensemble de la zone du Val de Loire est d’ailleurs classée au patrimoine mondial de l’Unesco depuis le 9 juillet 2017. En examinant l’historique ci-après à propos des principaux châteaux du Val de Loire, on pourra juger des nombreuses péripéties qui ont jalonné le classement de ces différents monuments. Le double critère de la propriété et des périodes de construction explique en partie ce qui peut apparaître aujourd’hui, rétrospectivement, comme une hétérogénéité dans le traitement du classement de ces monuments.

C’est ainsi que seulement cinq châteaux de la Loire bénéficient, dès 1840, de leur classement définitif au titre des monuments historiques : Amboise, Blois, Chambord, Chenonceau et Azay-le-Rideau.

Le château d’Amboise, classé dès 1840 :

Le château d’Amboise, dominant la Loire, a été profondément rénové et remanié à partir de 1489 par Charles VII, et c’est déjà lui qui, de retour d’Italie, avant François 1er, ramène à son service toute une équipe d’artistes. Plus tard, François 1er y reçoit Léonard de Vinci.

Après de nombreuses vicissitudes, ses murailles sont rasées. Sous Louis XIV, il sert de prison d’État et Fouquet y sera incarcéré. L’édifice est en grande partie détruit sous la Révolution. Napoléon le donne ensuite à un ancien membre du Directoire, le sénateur Roger Ducos, qui, n’ayant pas les moyens de l’entretenir, fait détruire en 1806 une partie importante des bâtiments (dont le logis des Sept-Vertus).

En 1814, à l’occasion de la Première Restauration, le château est restitué à l’héritière du duc de Penthièvre, Louise-Marie-Adélaïde de Bourbon, duchesse d’Orléans, qui est revenue de son exil espagnol. Après une nouvelle confiscation temporaire durant les Cent Jours, le château est rendu définitivement à la famille d’Orléans en 1815.

À la mort de la duchesse, en 1821, le château revient à son fils, Louis-Philippe d’Orléans, qui y fait d’emblée réaliser des travaux afin de transformer le château en lieu de villégiature. Devenu roi des Français en 1830, il soutient ardemment la défense du patrimoine français. Il obtient alors le classement du château à l’inventaire des monuments historiques en 1840.

Mais, avec la révolution de 1848, le château est à nouveau mis sous séquestre. Il ne sera définitivement restitué à la famille d’Orléans qu’en 1873, après l’avènement de la IIIème République. Elle le transforme en maison de bienfaisance pour personnes âgées. Le château est restauré seulement à la toute fin du XIXe siècle. Il est actuellement toujours propriété de la Fondation Saint Louis, qui assure la conservation d’une grande partie des biens de la famille d’Orléans.

Le château d’Amboise, 1863-années 1890, photographe inconnu, collection Magendie, MAG1219

La photo ci-dessus est un témoignage particulièrement intéressant : elle montre le bâtiment dans son état postérieur à la restitution auprès de la famille d’Orléans, mais avant sa restauration : la tour des Minimes, tout à gauche, est surmontée par une verrière en rotonde (vertement critiquée par Gustave Flaubert lors de son passage avant 1847) ; et, sur le toit du logis principal, on note quatre chiens-assis portant des fenêtres à meneaux Renaissance. Sur la droite du toit, une surélévation dénote. À l’issue de sa restauration, comme on peut le voir sur la photo ci-dessous, cette « verrue » est rasée, deux nouvelles fenêtres à meneaux sont créées pour assurer une uniformité au niveau des toitures et la verrière de la tour des Minimes est supprimée.

Vue 02 – Le château d’Amboise dans son état actuel (Ministère de la Culture)

Au moment de son classement au titre des Monuments historiques, ce château est donc une exception, puisqu’il est une propriété d’une nature un peu particulière : il appartient à la Monarchie qui soutient la démarche de classement. Cette attitude et ce statut spécifique expliquent certainement son classement dès la première année, alors qu’il ne s’agit pas d’un monument public à proprement parler.

Le château de Blois, classé dès 1840 :

Le château de Blois a une très longue histoire. Mais le bâtiment actuel, celui qui a été classé, date du début du XVIe siècle. François 1er, dès son accession au trône en 1515, et son épouse Claude de France, ayant l’intention de quitter le château d’Amboise, meublent le château de Blois pour y installer la Cour. Cette même année, François 1er lance la construction d’une nouvelle aile, de style Renaissance et y commence une des plus importantes collections de livres de l’époque. La direction des travaux est donnée à l’architecte italien Dominique de Cortene à qui l’on doit l’escalier monumental.

Château de Blois : le célèbre escalier à vis de l’aile François 1er, 1855-1870, photographe inconnu, collection Magendie, Mag1363

Mais après la mort de sa femme au château, en 1524, la construction s’arrête ; François Ier délaisse le château de Blois au profit du château de Fontainebleau où il envoie l’impressionnante bibliothèque pour fonder la Bibliothèque nationale. Blois n’est cependant pas délaissée pour autant, Blois devenant ainsi une sorte de « pouponnière » royale où sont éduqués les enfants royaux jusqu’à Catherine de Médicis (Claude de France y avait mis au monde sept enfants). Le 18 octobre 1534, le château est le théâtre de l’affaire des Placards : des tracts contre la messe sont affichés clandestinement par des partisans de l’Église réformée, jusque sur la porte de la chambre du roi. Cette affaire marque le début de la répression du protestantisme en France, après une période de relative tolérance.

Au moment de la Révolution, le château est à l’abandon depuis 130 ans et les révolutionnaires, soucieux de faire disparaître tout vestige de la royauté, le pillent et le vident de ses meubles, statues et autres objets. L’état du château est tel que sa démolition est envisagée, jusqu’à ce que Napoléon 1er décide de le céder à la ville de Blois en août 1810. Mais, par manque d’argent, le château est à nouveau affecté à l’armée comme caserne. En 1834, la moitié sud de l’aile Charles d’Orléans est détruite pour y établir des cuisines militaires. La présence militaire au château n’empêche pas l’ouverture au public de l’aile François Ier sous la Restauration. Le château est ainsi visité par Victor Hugo, Honoré de Balzac ou Alexandre Dumas.

Château de Blois : la statue équestre de Louis XII sur l’aile du même nom, 1857-1860, photographes Charles Paul Furne & Henri Tournier, collection Magendie, MAG6116

En 1840, le château est classé monument historique grâce à l’action de Prosper Mérimée qui obtient la remise en état du bâtiment en juillet 1844. Félix Durban est chargé des premières restaurations en 1846, qui se poursuivront jusqu’à sa mort en 1871. Le château est alors transformé en musée. Entre 1870 et 1879, une nouvelle campagne de restauration est entreprise sous la direction de Jules de La Morandière. Les vues de nos collections sont donc postérieures à la première restauration, mais antérieures à celles de 1870-1879 qui, toutefois, ont essentiellement porté sur les intérieurs. Sur la photo ci-dessus, on aperçoit néanmoins un petit échafaudage témoignant de travaux sur la porte basse, à droite de la porte monumentale.

Le château de Chambord, classé dès 1840 :

Le château de Chambord, folie architecturale agrémentée d’une toiture, de tours, de clochetons et de 365 cheminées, a été voulu et conçu sous François 1er. Ses plans pourraient être l’œuvre de Léonard de Vinci. Le gros œuvre fut achevé dès 1537.

Le château de Chambord : corps central de la façade principale, 1855-1899, photographe inconnu, collection Magendie, MAG1317

Même s’il reste de longues années à l’abandon entre la fin du règne de Louis XIV et la Révolution, le gros œuvre resta toujours en état. Dès la chute de Napoléon, en 1821, une souscription publique l’offre au duc de Bordeaux (futur Charles X), héritier de la Monarchie, ce qui n’empêchera pas son classement comme Monument historique dès 1840.

En 1871, son petit-fils, Henri, devenu comte de Chambord, ne parvient pas à maintenir une monarchie constitutionnelle. À sa mort, en 1883, le château échoit à son neveu par sa mère, le duc de Parme. L’État rachète finalement le monument à ce personnage en 1930 pour 11 millions de francs-or. Sur la photo ci-dessus, le château est donc encore propriété de la famille royale.

Vue 03 – Le château de Chambord aujourd’hui, façade nord-ouest (Ministère de la Culture)

Le château de Chenonceau, classé dès 1840 :

En 1512, Thomas Bohier, receveur des finances, devient définitivement propriétaire du château qui appartenait à la famille de Marques. Il le fait raser et ne garde que la tour ronde du donjon (XVe siècle). Sur l’emplacement d’un moulin, il fait édifier le nouveau bâtiment, qui s’achève en 1521. En 1555, Diane de Poitiers, favorite d’Henri II, et propriétaire du domaine, confie à Philibert Delorme la construction d’un pont sur le Cher. Catherine de Médicis, qui s’empare de Chenonceau au décès du roi, termine le pont en y faisant élever une galerie. La reine lègue le château à sa belle-fille, Louise de Lorraine, qui y vécut dans le deuil. L’édifice est l’une des premières créations de la Renaissance, demeure de plaisance remplaçant le château-fort. Les éléments autrefois défensifs servent ici d’ornement. Le corps de logis forme un quadrilatère édifié sur deux piles sur le fleuve. Une tourelle en cul de lampe orne chaque angle. La façade Est comprend en saillie la chapelle rectangulaire avec abside à trois pans. La grande galerie repose sur cinq piles. À l’intérieur, l’escalier qui conduit au premier étage est l’un des premiers escaliers droits construits en France. Le domaine est agrémenté de jardins à la française et d’un parc comprenant divers bâtiments dont les dômes, l’orangerie et la cour de ferme entourée de bâtiments en pierre et pans de bois…

Le château de Chenonceau, vue générale de la façade est, vraisemblablement dans l’état postérieur aux travaux de transformation, 1865-1870, photographe inconnu, collection Magendie, MAG2364

Malgré un avis défavorable de la commission de classement des monuments historiques, au motif que le monument était propriété privée, il a été classé dès 1840.

En 1847, Gustave Flaubert et son ami Maxime du Camp visitent Chenonceau. À ce moment, il est propriété de François Vallet de Villeneuve, aristocrate rallié à Napoléon 1er qui l’a fait comte d’Empire. Après la chute de l’Empire, l’aristocrate et son épouse s’y retirent et y mènent une vie de gentilshommes d’une grande simplicité qui séduit Flaubert, comme il séduira quelques années plus tard Georges Sand, qui écrit en décembre 1845 : « Chenonceau est une merveille. L’intérieur en est arrangé à l’antique avec beaucoup d’art et d’élégance. On y jette toujours son pot de chambre par la fenêtre, ce qui fait le bonheur de [mon fils] Maurice ! »

Le comte René de Villeneuve meurt au château en février 1863. Le domaine revient à ses deux enfants, la marquise de La Roche-Aymon et Septime de Villeneuve, qui ne conserveront pas la dispendieuse demeure, et la mettront en vente en avril 1864.

Il est acquis par Mme Pelouze, riche héritière d’un industriel écossais, Daniel Wilson. Elle entreprend alors, de 1865 à 1878, la « restauration » du château et de son domaine pour une somme estimée à plus d’un million et demi de francs-or. La nouvelle propriétaire fait appel à l’architecte Félix Roguet, disciple de Viollet-le-Duc, pour diriger le pharaonique projet. Les transformations sont difficiles à apercevoir sur les photos dont nous disposons, qui semblent toutefois postérieures à ces interventions. Les jardins, quant à eux, ont bénéficié du nouveau dispositif de classements comme « jardin remarquable » en juillet 2020.

Château de Chenonceau, vue de la façade ouest, 1870-1900, photographe inconnu, collection Magendie, Mag1170

Le château d’Azay-le-Rideau, classé en 1840, déclassé en 1888, puis reclassé en 1914 :

Le premier château médiéval d’Azay est construit aux alentours de 1119 par l’un des premiers seigneurs du lieu, Ridel (ou Rideau) d’Azay, une forteresse défensive censée protéger la route entre Tours et Chinon. Celle-ci est brûlée par les Anglais en 1355. Gilles Berthelot le fait raser pour édifier, sur cet emplacement, le bâtiment actuel, qui aurait été construit par l’architecte Etienne Rousseau, de 1518 à 1529. Le château change ensuite très fréquemment de propriétaire.

Azay-le-Rideau, vue extérieure du château, 1930-1960, photographe inconnu, collection Lasserre, JPL310

Il fait alors l’objet d’une première inscription sur la liste des monuments historiques en 1840, mais, en 1845, les derniers vestiges médiévaux ayant été démolis pour laisser place à deux nouvelles tours d’angle sur cour, l’édifice est déclassé en 1888 !

En 1871, pendant un mois, la demeure est occupée par Frédéric Charles de Prusse, neveu du roi de Prusse, et son état-major ; les propriétaires du château, les Biencourt mère et fils, doivent alors se réfugier dans les communs.  Ruiné par le krach boursier de l’Union générale en 1882, le dernier des marquis de Biencourt est contraint de vendre son château à l’État, opération qui ne se concrétise qu’en août 1905. Le classement définitif intervient finalement en avril 1914.

Vue 04 – Vue actuelle du château d’Azay-le-Rideau (Ministère de la Culture)

Le château de Saumur, classé en 1862 :

Saumur, vue générale, avec le château dominant la ville à gauche sur la colline, 1900-1910, photographe inconnu, collection Magendie, Mag4797

L’origine du château remonte au Xe siècle. Le donjon a été érigé au début du XIIe siècle, puis entouré d’une forteresse au XIIIe siècle par Saint-Louis. Cette forteresse se composait de quatre tours rondes réunies par d’épaisses courtines.

Vue 05 – Le château de Saumur vers 1440, dans les Très Riches Heures du duc de Berry, mois de septembre (Extrait, Musée Condé)

À partir de 1368, Louis 1er d’Anjou, petit-fils de Philippe VI, fait remplacer les vieilles tours rondes par des tours octogonales, et transforme l’édifice en logis de plaisance, donnant au château l’essentiel de sa silhouette actuelle. À la fin du XVIe siècle, d’importants remparts sont érigés autour du château.

Ensuite, René d’Anjou améliore le confort de l’ensemble du château qu’il surnomme le « château d’amour » : c’est ce château qui est illustré dans les célèbres Très Riches Heures du duc de Berry (folio du mois de septembre représentant les vendanges). Il y résidera jusqu’en 1480.

Le château est ensuite transformé en prison en 1810 sur ordre de Napoléon. Les travaux prennent six ans mais les cellules ne seront utilisées que trois mois jusqu’au premier exil de Napoléon. Sous Louis XVIII, il devient en 1814, un dépôt d’armes et de munitions ; les habitants de Saumur se plaignent souvent des explosions qui ont lieu dans le château. Il est classé monument historique en 1862. La ville de Saumur rachète le château à l’État en 1906 et le rénove progressivement. Les extérieurs et les abords font ensuite l’objet d’un classement complémentaire en novembre 1964.

Le 22 avril 2001, la partie ouest du rempart nord s’effondre et endommage une partie des habitations situées en contrebas. Il s’ensuit un chantier de stabilisation du sous-sol et de reconstruction du rempart qui s’achève en 2007.

Le château de Châteaudun, classé en 1918 :

Le château initial avait été élevé par Thibaut le Tricheur, comte de Blois au Xe siècle. Charles d’Orléans ayant fait don du château à son demi-frère Jean de Dunois en 1439, dit le « bâtard d’Orléans » ou « Dunois », compagnon d’armes de Jeanne d’Arc. En 1452 ce dernier entreprend l’édification de la chapelle et du corps de logis de style gothique. Les travaux sont poursuivis, à partir de 1459 jusqu’à la mort de Dunois, par Nicole Duval, entrepreneur et maître maçon. Son œuvre est poursuivie jusqu’à 1518 par ses descendants les ducs de Longueville qui édifient l’aile nord ou aile Longueville de style Louis XII, qui fait transition entre l’art gothique flamboyant et la première Renaissance.

Châteaudun, l’escalier d’honneur (façade sud de l’aile nord du château), 1890-1904, carte postale, photographe inconnu, collection Wiedemann, WIE790

La famille Longueville s’éteint sans descendance en 1694. Le château revient alors aux ducs de Luynes. À moitié abandonné par ses propriétaires, il sert ensuite de refuge aux habitants de Châteaudun après l’incendie qui ravage la ville en 1723.

Ce château est néanmoins l’un des plus intéressants édifices civils de la fin du XVe et du début du XVIe siècle. Il occupe l’extrémité d’un promontoire rocheux dominant l’ancien gué du Loir. Les abords n’ont pas été modifiés depuis le XVIIe siècle. Entre le château et le Loir, des jardins ont conservé leur tracé ancien, leurs gloriettes, leurs allées de vieux tilleuls et le mur de quai sur le Loir.

Les premières restaurations sont lancées par le duc Théodoric de Luynes avec l’architecte Frédéric Debacq en 1866. Mais, le château sera endommagé par les Prussiens durant la bataille de Châteaudun en 1870. Demeuré propriété privée, Châteaudun attendra juillet 1918 pour obtenir le classement du corps de bâtiment à proprement parlé, les abords et dépendances n’étant ensuite définitivement classés qu’en avril 1947. Mais, dès 1938, il est acquis par l’État qui entame sa restauration, sous la direction de J.M. Trouvelot. L’explosion du pont franchissant le Loir en 1944 déstabilisa les parties hautes du monument, qui purent néanmoins être redressées sans démontage.

Le château de Langeais, classé en 1922 :

Le château de Langeais, vue générale, 1890-1904, carte postale, photographe inconnu, collection Wiedemann, WIE786

Construit au début du règne de Louis XI, le château se compose de deux ailes, mêlant forteresse médiévale et ouverture sur la Renaissance. En 1496, y est célébré le mariage d’Anne de Bretagne avec Louis XII. En 1839, pour éviter un démantèlement par des démolisseurs, le château est acquis par M. Baron qui va s’avérer un efficace mécène pour cet édifice, le faisant soigneusement restaurer.

Son fils, ruiné, est contraint de vendre le château en juillet 1886 au banquier et homme d’affaires mulhousien Jacques Siegfried, qui, pendant 20 ans, le restaure et le remeuble avant de le donner à l’Institut de France en mars 1904, avec réserve d’usufruit pour ses héritiers. Cette donation ouvrira la porte à son classement qui intervient finalement en mars 1922.

Le château de Cheverny, seulement inscrit en 1926 et définitivement classé en 2010 :

Le château de Cheverny, la façade nord en cours de travaux, 1928, photographe Alexis Croly-Labourdette, collection Besson, BL165

Le château est construit sur l’emplacement d’un ancien manoir du XVIe siècle, dont il ne demeure que les communs. Édifié de 1625 à 1629 par l’architecte Boyer (également architecte du château de Blois), le château est un compromis entre le style Renaissance et le style Louis XIV. Il est formé d’un bâtiment central rectangulaire, flanqués de deux ailes à grands pavillons carrés. Sa décoration intérieure conserve des décors du peintre Jean Mosnier, des lambris peints, des plafonds à compartiments, caractéristiques du style Louis XIII.

Il est, depuis le XVIe siècle, la résidence des marquis de Vibraye ; de style trop « classique » pour les premiers classements, et propriété privée, il échappa aux premières procédures de classement, pour n’être seulement inscrit qu’en février 1926, avant son classement définitif seulement en juin 2010.

Hébergeant une meute, le marquis y organise régulièrement des chasses à courre. Le château de Cheverny a inspiré Hergé dans sa représentation du château de Moulinsart, qui en est une réplique amputée de ses deux pavillons extrêmes.

Le château de Villandry, inscrit en 1927 et classé définitivement en 1934 :

Le château de Villandry, vue générale, 1900-1949, photographe Alexis Croly-Labourdette, collection Besson, BL103

Cette demeure seigneuriale, élevée en 1532 par Jean Le Breton, secrétaire d’État de François 1er, conserve un donjon du XIVe siècle. Le château a été modernisé à partir de 1754 par son propriétaire Michel-Ange de Castellane, qui a fait construire les communs avec leurs toits à la Mansart. La demeure a été achetée en 1906 par Joachim Carvallo (1869-1936) fondateur de l’association La Demeure historique, marié à une héritière américaine, Anne Coleman.

Son propriétaire obtient l’inscription de son château en avril 1927, et son classement définitif en septembre 1934.

S’inspirant des textes anciens, Carvallo a fait restaurer les jardins du château, une restitution conjecturale d’un jardin à la française du XVIe siècle qui s’accorde avec les bâtiments. Ces jardins sont divisés en trois étages, avec un potager en bas, un jardin d’ornement constitué de broderies de buis taillés et une terrasse supérieure comportant un jardin d’eau avec cascades et charmilles. Les fontaines et tonnelles du jardin ont été restaurées à partir de 1994. Ces jardins ont été classés au titre des jardins remarquables en juillet 2020.

Vue 05 – Les jardins du château de Villandry, vue actuelle (Ministère de la Culture)

Christian Bernadat

Sources :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

trois + 17 =

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.