Partie 2 de cette une consacrée aux représentations des fables dans les vues stéréoscopiques faisant parties de nos collections !

La Lice et sa compagne

Gravure de Pierre-Étienne Moitte d'après Jean-Baptiste Oudry, édition Desaint & Saillant, 1755-1759

Pour ce deuxième épisode des fables de la Fontaine nous commençons avec « La Lice et sa compagne » qui est la septième fable du livre II de Jean de La Fontaine situé dans le premier recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en 1668.

Une Lice étant sur son terme,
Et ne sachant ou mettre un fardeau si pressant,
Fait si bien qu’à la fin sa Compagne consent
De lui prêter sa hutte, où la Lice s’enferme.
Au bout de quelque temps sa Compagne revient.
La Lice lui demande encore une quinzaine ;
Ses petits ne marchaient, disait-elle, qu’à peine.
Pour faire court, elle l’obtient.
Ce second terme échu, l’autre lui redemande
Sa maison, sa chambre, son lit.
La Lice cette fois montre les dents, et dit :
« Je suis prête à sortir avec toute ma bande,
Si vous pouvez nous mettre hors. « 
Ses enfants étaient déjà forts.
Ce qu’on donne aux méchants, toujours on le regrette.
Pour tirer d’eux ce qu’on leur prête,
Il faut que l’on en vienne aux coups ;
Il faut plaider, il faut combattre.
Laissez-leur prendre un pied chez vous,
Ils en auront bientôt pris quatre.

La fable « La Lice et sa Compagne » de Jean de La Fontaine raconte l’histoire de deux chiennes. L’une, enceinte et proche de mettre bas, demande à l’autre de lui prêter son terrier pour accoucher. La compagne accepte, mais lorsque vient le moment de récupérer son terrier, la lice refuse de partir, arguant que ses petits ont encore besoin de protection.

Fables de La Fontaine, La Lice et sa compagne, collection Dupin 1858, DUP0376

« La Lice et sa Compagne » fait référence à la prudence qu’il faut avoir lorsqu’on prête quelque chose ou qu’on rend service, particulièrement quand il s’agit de biens précieux ou importants. La fable illustre le risque que certaines personnes abusent de la gentillesse et de la confiance qu’on leur accorde, en ne respectant pas les termes de l’accord initial et en profitant indûment de la situation. Pour cette vue stéréoscopique, Furne et Tournier ont mis de côté l’anthropomorphisme des fables de la Fontaine pour choisir de représenter cette histoire de façon très réaliste avec une mère et ses enfants.

L'ours et les deux compagnons

Gravure de Pierre-Étienne Moitte d'après Jean-Baptiste Oudry, édition Desaint & Saillant, 1755-1759

Pour continuer ce deuxième article du mois sur les Fable de La Fontaine penchons nous sur « L’ours et les deux compagnons » Livre V Fable 20 Livre V, fable 20 

Deux Compagnons pressés d’argent À leur voisin Fourreur vendirent La peau d’un Ours encor vivant ; Mais qu’ils tueraient bientôt, du moins à ce qu’ils dirent. C’était le Roi des Ours, au conte de ces gens. Le Marchand à sa peau devait faire fortune : Elle garantirait des froids les plus cuisants ; On en pourrait fourrer plutôt deux robes qu’une. 

Dindenaut prisait moins ses Moutons qu’eux leur Ours : Leur, à leur compte, et non à celui de la Bête. S’offrant de la livrer au plus tard dans deux jours, Ils conviennent de prix, et se mettent en quête ; Trouvent l’Ours qui s’avance, et vient vers eux au trot. Voilà mes Gens frappés comme d’un coup de foudre. Le marché ne tint pas ; il fallut le résoudre : D’intérêts contre l’Ours, on n’en dit pas un mot. L’un des deux Compagnons grimpe au faîte d’un arbre. L’autre, plus froid que n’est un marbre, Se couche sur le nez, fait le mort, tient son vent , 

 Ayant quelque part ouï dire Que l’Ours s’acharne peu souvent Sur un corps qui ne vit, ne meut, ni ne respire. Seigneur Ours, comme un sot, donna dans ce panneau. Il voit ce corps gisant, le croit privé de vie, Et de peur de supercherie Le tourne, le retourne, approche son museau, Flaire aux passages de l’haleine. C’est, dit-il, un cadavre : ôtons-nous, car il sent. A ces mots, l’Ours s’en va dans la forêt prochaine. L’un de nos deux Marchands de son arbre descend ; Court à son Compagnon, lui dit que c’est merveille Qu’il n’ait eu seulement que la peur pour tout mal. Et bien, ajouta-t-il, la peau de l’Animal ? Mais que t’a-t-il dit à l’oreille ? Car il s’approchait de bien près, Te retournant avec sa serre. Il m’a dit qu’il ne faut jamais Vendre la peau de l’Ours avant qu’on ne l’ait mis par terre.

Deux compagnons vendent la peau d’un ours encore vivant à un marchand fourreur. Ils prétendent qu’ils le tueront bientôt. Cependant, lorsqu’ils rencontrent l’ours, ils sont terrifiés et ne parviennent pas à le tuer. L’un feint d’être mort, tandis que l’autre grimpe dans un arbre. 

Tout le monde connaît l’expression ne pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. La fable « L’Ours et les deux Compagnons » de Jean de La Fontaine illustre parfaitement cette sagesse : deux hommes vendent la peau d’un ours encore vivant, mais se retrouvent dans une situation périlleuse lorsqu’ils rencontrent l’animal.

L'astrologue qui se laisse tomber dans un puits

Gravure de Jacques-Philippe Le Bas d'après Jean-Baptiste Oudry, édition Desaint & Saillant, 1755-1759

Hélas nous approchons de la fin de la série de  » La représentions des Fables  dans les vues stéréoscopiques » pour ce dernier article voyons ensemble « L’astrologue qui se laisse tomber dans un puits » qui est la treizième Fable du Livre II de 1668

Un Astrologue un jour se laissa choir Au fond d’un puits. On lui dit : Pauvre bête, Tandis qu’à peine à tes pieds tu peux voir, Penses-tu lire au-dessus de ta tête ? Cette aventure en soi, sans aller plus avant, Peut servir de leçon à la plupart des hommes. Parmi ce que de gens sur la terre nous sommes, Il en est peu qui fort souvent Ne se plaisent d’entendre dire Qu’au Livre du Destin les mortels peuvent lire. 

Mais ce Livre qu’Homère et les siens ont chanté, Qu’est-ce, que le hasard parmi l’Antiquité, Et parmi nous la Providence ? Or du hasard il n’est point de science: S’il en était, on aurait tort De l’appeler hasard, ni fortune, ni sort, Toutes choses très incertaines. Quant aux volontés souveraines De celui qui fait tout, et rien qu’avec dessein, Qui les sait, que lui seul ? Comment lire en son sein ? Aurait-il imprimé sur le front des étoiles Ce que la nuit des temps enferme dans ses voiles ? A quelle utilité ? Pour exercer l’esprit De ceux qui de la sphère et du globe ont écrit ? Pour nous faire éviter des maux inévitables ? Nous rendre dans les biens de plaisir incapables ? Et causant du dégoût pour ces biens prévenus, Les convertir en maux devant qu’ils soient venus?

 C’est erreur, ou plutôt c’est crime de le croire. Le firmament se meut ; les astres font leur cours, Le soleil nous luit tous les jours, Tous les jours sa clarté succède à l’ombre noire, Sans que nous en puissions autre chose inférer Que la nécessité de luire et d’éclairer, D’amener les saisons, de mûrir les semences, De verser sur les corps certaines influences. Du reste, en quoi répond au sort toujours divers Ce train toujours égal dont marche l’univers ? Charlatans, faiseurs d’horoscope, Quittez les Cours des Princes de l’Europe ; Emmenez avec vous les souffleurs tout d’un temps. Vous ne méritez pas plus de foi que ces gens. Je m’emporte un peu trop ; revenons à l’histoire De ce Spéculateur qui fut contraint de boire. Outre la vanité de son art mensonger, C’est l’image de ceux qui bâillent aux chimères Cependant qu’ils sont en danger, Soit pour eux, soit pour leurs affaires

La fable en tant que telle est assez brève et laisse rapidement place à une profonde réflexion de l’auteur. Au XVIIe siècle, l’astrologie passionnait les esprits. Le terme “charlatans” évoque peut-être la médecine basée sur les partisans de la considération du corps humain comme une réduction de l’univers ou de ses diverses parties. Les “faiseurs d’horoscope” avaient même dressé l’horoscope de Louis XIV à sa naissance. Le “souffleur” est quant à lui à la recherche de la pierre philosophale, cette substance qui transmute les métaux en or. La Fontaine critique l’astrologie (et non l’astronomie), interroge la place que l’homme se donne par rapport à Dieu et sépare les lois qui régissent l’Univers de ce qui peut arriver aux hommes.

L’image est une stéréographie sépia représentant une scène avec quatre personnages. À gauche, on voit un individu vêtu d’une tenue qui semble être celle d’un astrologue traditionnel, avec une longue robe et un chapeau pointu, regardant à travers un télescope pointé vers le ciel. Ce personnage a fait tomber ou renversé des livres qui sont maintenant éparpillés par terre. À sa droite, trois enfants observent la scène, cette image est intéressante car elle capture un moment ironique où un astrologue, probablement absorbé par l’étude des étoiles, a négligé son environnement immédiat, entraînant la chute des livres. La présence des enfants suggère qu’ils pourraient trouver cela amusant ou curieux. La morale de cette histoire : Ne regarde pas trop haut, ou tu risques de perdre pied. La vraie sagesse se trouve souvent juste sous nos yeux !

Et voila nous avons termine sur la série , les Fables de La Fontaine sont un trésor littéraire, et j’espère que vous avez apprécié cette série autant que nous, c’est un chef d’œuvre littéraire tout comme sa série stéréo 

Léopold Martin

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