Ces notes de voyage font ainsi un écho instructif à la commémoration de la sauvegarde du patrimoine du mois de septembre. Le grand homme y compare Bordeaux à Versailles et Anvers, mais peut-être pas dans le sens que l’on pourrait lui prêter au premier abord : il oppose la rectitude certes élégante de Versailles aux vieilles rues d’Anvers pleines du souvenir de leur passé populaire, exprimant, sur la ville girondine, un jugement très nuancé :
« On loue Bordeaux comme on loue la rue de Rivoli : régularité, symétrie, grandes façades blanches et toutes pareilles les unes aux autres, etc. ; ce qui pour l’homme de sens veut dire architecture insipide, ville ennuyeuse à voir. Or, pour Bordeaux, rien n’est moins exact. Bordeaux est une ville curieuse, originale, peut-être unique. »
C’est dans ce contexte qu’Hugo exprime cette formule devenue célèbre : « Prenez Versailles et mêlez-y Anvers, vous avez Bordeaux. »
« Il y a deux Bordeaux, le nouveau et l’ancien. Tout dans le Bordeaux moderne respire la grandeur comme à Versailles ; tout dans le vieux Bordeaux raconte l’histoire, comme à Anvers ».
De ce fait, il interpelle ainsi les Bordelais : « Que les Bordelais y prennent garde ! Versailles ne représente qu’un homme et un règne ; Anvers représente tout un peuple et plusieurs siècles. Maintenez donc l’équilibre entre les deux cités ; mettez le holà entre Anvers et Versailles ; embellissez la ville nouvelle ; conservez la ville ancienne. Vous avez eu une histoire, vous avez été une nation, souvenez-vous en, soyez en fiers ! »